LA PERIODE COLONIALE Le Chili précolombien était habité par des peuples divers, dont les Picunches (au nord), soumis aux Incas, les Huilliches (au sud); les plus nombreux, les Araucans (Mapuches), résistèrent longtemps aux colonisateurs.
Diego de Almagro découvre le Chili en 1536; Pedro de Valdivia en dirige la difficile conquête en 1541 et fonde les villes de Santiago et de Concepción. Mais le pays n'est pas pacifié, et il faudra trois siècles aux Espagnols pour vaincre définitivement les Indiens (guerre d'Arauco).
Le territoire chilien, le plus isolé et le plus éloigné des colonies espagnoles, fait partie de la vice-royauté de Lima jusqu'en 1778. Le manque de débouchés freine le développement de l'élevage. Si les créoles dominent la vie rurale, les métropolitains contrôlent le commerce avec l'Espagne. Les créoles se métissent avec la population indienne - au point que leurs différences culturelles s'estompent -, alors que les Espagnols péninsulaires, leurs rivaux, ne s'intègrent guère à la société.
L'INDEPENDANCE A la fin du XVIII e siècle, le Chili vit pauvrement; en matière économique, le pacte colonial privait ses habitants de toute liberté commerciale. L'Espagne attribue à ses ressortissants les positions élevées dans l'administration, l'armée et l'Eglise, intensifiant les frustrations des créoles.
L'indépendance des Etats-Unis et la Révolution française font mûrir la volonté d'émancipation. La défaite de Trafalgar prive l'Espagne de sa flotte; dès lors, elle est incapable de maintenir sa suprématie en Amérique latine. La mise en place d'une junte de gouvernement (18 septembre 1810), qui préfigure l'indépendance, est suivie par une guerre contre l'Espagne. Bernardo O'Higgins, aidé par San Martín, vainc l'armée royaliste à Chacabuco (1817). O'Higgins, nommé «directeur suprême» du Chili, permet au pays de parfaire son indépendance un an plus tard. Jusqu'en 1830, le pays connaît une période troublée, ponctuée de soulèvements militaires. Diego Portales rétablit l'ordre, et une Constitution est promulguée en 1833, qui restera en vigueur jusqu'en 1925.
L'annexion du désert d'Atacama à l'issue de la guerre du Pacifique (1879-1883), au détriment de la Bolivie, permet au Chili de mettre la main sur d'importants gisements de nitrate et de cuivre; l'essor de la production agricole, l'afflux de capitaux anglais, puis américains, et l'immigration européenne stimulent dès lors le développement économique du pays.
EVOLUTION POLITIQUE AU XXE SIECLE En 1891, le pays connut une guerre civile visant à imposer la domination du Congrès - au sein duquel les intérêts des exportateurs, britanniques, de nitrate étaient fortement représentés - contre l'exécutif: le président Balmaceda s'était attaqué au monopole détenu par les entreprises britanniques. Depuis, le Chili vécut sous un régime parlementaire.
L'absence de majorité provoque une instabilité ministérielle chronique. Arturo Alessandri, président de 1920 à 1925, marque profondément le paysage politique de son empreinte: il fait adopter des lois sociales et la Constitution de 1925 rétablissant le pouvoir présidentiel. Les coups d'Etat n'épargnent pas le Chili, qui connut un régime militaire entre 1927 et 1931, mais Alessandri revient à la présidence (1932-1938) et raffermit le régime.
En 1938, le Front populaire remporte les élections et conserve le pouvoir jusqu'en 1948; il fonde en 1939 la Corporación de Fomento de la Producción, chargée de veiller au développement de l'économie. Le Front populaire éclate avec le renvoi des trois ministres communistes et l'interdiction de leur parti en 1947. Carlos Ibáñez del Campo, le général responsable de l'interruption du mandat des civils en 1927, revient au pouvoir et s'allie tour à tour avec la droite et la gauche.
En 1958, Jorge Alessandri (le fils d'Arturo) est élu au détriment de Salvador Allende: il défend les intérêts de la bourgeoisie et lance, timidement, la réforme agraire. Eduardo Frei (1964-1970) la poursuit plus activement (le latifundisme freine alors la modernisation de l'agriculture), mais il ne tarde pas à limiter le droit de grève et l'exercice du pouvoir syndical, ce qui entraîne de nombreux conflits sociaux. A l'élection présidentielle de 1970, aucun candidat n'obtient la majorité absolue: Salvador Allende est élu par le Congrès avec l'appui de la démocratie chrétienne.
L'EXPERIENCE ALLENDE Le 4 septembre 1970, le sénateur socialiste Salvador Allende arrive en tête de l'élection présidentielle avec une majorité relative (36,3 %). Elu par le Congrès, il applique de 1970 à 1972 un programme de réformes profondes: 60 % des terres labourables et 80 % des industries - dont celle du cuivre - sont nationalisées; une politique de redistribution des revenus est engagée, qui mécontente et inquiète la bourgeoisie et l'administration américaine.
Très vite les difficultés surgissent: l'Unité populaire, regroupant les partis communiste, socialiste et radical, ainsi que le MAPU (Mouvement d'action populaire unitaire) et la Gauche chrétienne, se divise; la possibilité d'une alliance avec les démocrates-chrétiens s'effrite et les partis d'opposition conduisent une guérilla constitutionnelle; l'extrême gauche (MIR) juge les réformes trop timides et l'extrême droite entretient un climat de violence (attentats, assassinats).
Simultanément, la situation économique se dégrade («mur de l'argent», blocus économique déguisé qu'imposent les Etats-Unis) et l'opposition militaire s'accroît. La grève des camionneurs, puis des transporteurs, paralyse le pays et prépare le terrain au coup d'Etat de septembre 1973.
LA DICTATURE MILITAIRE Le 11 septembre 1973, une junte militaire dirigée par le général Augusto Pinochet renverse le socialiste Allende, qui meurt en se battant contre les putschistes. Pour «extirper le cancer marxiste», l'armée applique brutalement la doctrine de la «sécurité nationale», et la dictature viole systématiquement les droits de l'homme (arrestations, tortures, assassinats).
L'état d'urgence est proclamé, le Congrès fermé, les syndicats interdits, la presse censurée; l'armée concentre tous les pouvoirs. Le putsch du général Pinochet met un terme à la Constitution de 1925. Gouvernant à l'aide de décrets, le régime se donne une assise juridique avec la Constitution de 1981. Le président nomme les ministres, contrôle l'appareil judiciaire et commande les armées.
La politique économique consiste à privatiser les entreprises nationalisées, à donner la priorité aux activités exportatrices et à faire appel aux capitaux étrangers. En 1989, le bilan socio-économique est mitigé.
LE PLEBISCITE DU 5 OCTOBRE 1988Pinochet, qui cherche à légitimer sa position et à rester à la présidence jusqu’en 1997, décide d’un référendum, sur d’être plébiscité et de gagner. Après la campagne pleine d’espoir du « NO » à Pinochet, le 5 octobre 1988, celui-ci perd le plébiscite, avec 55% de non. Il accepte difficilement le résultat mais la Constitution de 1980 lui permet de garder le pouvoir sur l’armée.
1/3 du Sénat est désigné par lui et bloque toute réforme à la Constitution. Le régime se voit obligé de tenir sa parole et doit organiser des élections présidentielles un an plus tard.
LE CADRE DE LA NOUVELLE DEMOCRATIE L'année 1990 suscita de vifs espoirs au Chili; le démocrate-chrétien Patricio Aylwin, candidat du CPD (Concertation de partis pour la démocratie), remporte l'élection du 14 décembre 1989, avec 55 % des suffrages, face au candidat de la dictature (30 %); il devient président le 11 mars 1990. En dépit de progrès notables (reconnaissance du droit de grève, meilleure justice fiscale, liberté d'expression), la nouvelle démocratie hérite d'une situation qui limite considérablement sa capacité d'action.
Pinochet, qui est devenu commandant de l'armée de terre, préside le Conseil national de sécurité. Faisant suite à son échec lors du référendum, il promulgue des décrets pour préserver son pouvoir et se réserve le droit de nommer 9 sénateurs sur 48. Le 10 mars 1998, il quitte le commandement de l'armée de terre pour occuper un siège à vie, au Sénat.
Sur le plan économique et social, l'action du nouveau gouvernement est limitée par l'austérité budgétaire et le dérapage inflationniste. Pourtant le Chili est incontestablement le pays d'Amérique latine qui obtient les meilleurs résultats sur le plan économique. Alors que le démocrate-chrétien Eduardo Frei, élu à la présidence le 11 décembre 1993 avec la plus forte majorité de l'histoire du pays, prend ses fonctions le 11 mars 1994, le Chili conserve un rythme de croissance annuel supérieur à 7 % et voit l'inflation passer sous la barre des 10 %. Le 9 décembre 1994, le président Clinton invite le Chili à rejoindre l'ALENA.
En mars 1998, Pinochet quitte le commandement de l'armée de terre et entre au Sénat, où il doit occuper un siège à vie. Toutefois, de passage à Londres, ce dernier est arrêté dans le cadre d'une procédure d'extradition initiée par la justice espagnole, qui le met en accusation pour les crimes commis contre des opposants chiliens entre 1973 et 1989. Après quinze mois de rebondissements judicaires, au cours desquels la question de l'immunité diplomatique dont jouit l'ancien chef-d'Etat, l'instauration d'une juridiction internationale à l'encontre des responsables de crimes contre l'humanité et décisions successives, la compétence éventuelle de la justice espagnole pour juger les crimes de l'ancien dictateur, le contexte diplomatique et les plaintes des familles des victimes du dictateur et des associations de défense des droits de l'homme, sont abordés, la justice britannique invoque les ennuis de santé de l'ancien dictateur, pour autoriser son retour au Chili et lui permettre d'être jugé par ses concitoyens
Parallèlement, la Cour suprême chilienne de justice approuve l'arrestation et l'inculpation d'une quarantaine d'officiers et d'anciens agents de police secrète de l'ancien dictateur. Parallèlement, la vie politique est dominée par la victoire, lors des élections présidentielles organisées en janvier 2000, du candidat de la coalition de centre-gauche et ancien ministre des Travaux publics dans le gouvernement d'Eduardo Frei, Ricardo Lagos, qui devance son principal adversaire, Joaquin Lavin (droite), avec 51,32 % des suffrages contre 48,68 % pour ce dernier.
Considéré comme l'un des principaux artisans du retour à la démocratie, Ricardo Lagos avait auparavant convaincu l'opposition à Pinochet, regroupée sous sa présidence au sein de l'Alliance démocratique, de participer au référendum d'octobre 1988, était à l'origine, en 1989, de la Concertation démocratique, réunissant socialistes et démocrates-chrétiens, et s'était déclaré favorable à un retour au pays du général Pinochet, afin qu'il y soit jugé. Le 8 août, la Cour suprême de Santiago annonce officiellement la levée de l'immunité parlementaire du sénateur Pinochet, se réservant ainsi le droit d'instruire les 157 plaintes, déposées par les familles des victimes de l'ancien régime, contre Pinochet.
AU JOUR D’AUJOURD’HUI, PINOCHET N’A TOUJOURS PAS ETE JUGE…Source: www.memo.frSi vous souhaiter obtenir plus d'information sur les victimes de la dictature nous vous conseillons de vous rendre sur le site www.memoriaviva.com (site en espagnol)